Rupture d’un abalakov observée dans l’infrarouge!

L’abalakov (également connu sous le nom de lunule), nommé d’après le grimpeur soviétique Vitaly Abalakov, est un élément de protection bien connu en escalade de glace.

Fig.1: https://www.petzl.com/US/en/Sport/Rappelling-on-an-abalakov?ActivityName=Ice-climbing

Il est utilisé surtout lors du rappel, car son utilisation évite de laisser du matériel coûteux sur la paroi.

Il est très sécuritaire s’il est fait correctement.

Selon les travaux effectués par Beverly J. et Attaway W. (1), plus la zone entourée par l’abalakov est grande, plus il est probable qu‘il soit solide. Une longue vis à glace (21 cm par exemple) et une cordelette de 7 mm de diamètre minimum sont recommandées pour sa confection (2).

Lors de l’édition 2020 du festival Grimpe en Ville, nous avons eu la chance d’utiliser une caméra infrarouge haute vitesse de la compagnie Telops, basée à Québec, pour capter des images de ruptures d’abalakov pendant un atelier dirigé par André Laperrière. Cet équipement de haute technologie est sensible à la température émise par les objets.

Fig.2: Photo de la caméra sur le site du Festival Grimpe en Ville en 2020.

Pour cette démonstration, un abalakov a été construit à l’aide d’une vis à glace de 16 cm (plus courte que celle recommandée) et une cordelette plus mince, soit 6 mm. Cette combinaison n’offre pas une résistance normalement suffisante. Le construire de cette façon nous permet d’appliquer assez de force pour le faire céder! L’abalakov a été chargé à l’aide d’un tire-fort manuel et la force appliquée a été mesurée avec un dynamomètre. La figure 3 montre une vidéo de la rupture de l’abalakov prise par une caméra conventionnelle.

Fig.3: La rupture de l’abalakov filmée dans le visible (temps réel).

Malgré sa construction relativement déficiente, cet abalakov a résisté jusqu’à 9,5 kN, ce qui correspond à 2135 livres-force (lbf). Même si ce n’est pas ce qui est recommandé, il serait donc assez résistant pour effectuer un rappel! La figure 4 montre le même abalakov filmé avec la caméra infrarouge haute vitesse. La vidéo a été ralentie considérablement.

Fig.4: La rupture de l’Abalakov dans l’infrarouge (au ralenti). Sur la vidéo, le bleu représente une température froide alors que le violet indique une température plus élevée.

La figure 5 montre quelques détails révélés par la caméra thermique. On remarque la température plus élevée sur le nœud sous tension, au point d’attache du mousqueton, ainsi que sur la section de cordelette sous pression derrière la colonne de glace. Lorsque la colonne de glace cède, on peut apercevoir l’échauffement de la glace (2-3°C) à l’endroit où la cordelette appliquait une pression.

Fig.5: Images avant, pendant et après la rupture de l’Abalakov.

La figure 6 montre l’augmentation de la température à trois endroits dans l’image, soit la cordelette autour de la glace (haut), le nœud (centre) et le point d’attache reliant la cordelette au mousqueton (bas). On note une importante augmentation de la température (+7°C) au niveau du nœud de pêcheur double. Bien que la température augmente aux deux autres endroits, soit la cordelette et le mousqueton, celle-ci est moins importante qu’au niveau du nœud où il y a énormément de friction. Avec un abalakov plus résistant, il aurait été intéressant de voir à quel endroit la cordelette aurait cédée. Vu l’augmentation de température au nœud, il est pensable qu’elle aurait cédée à cet endroit.

Fig.6: Température en fonction du temps pour la cordelette autour de la glace (haut), du nœud (centre) et de la cordelette reliant le mousqueton (bas).

L’utilisation de caméra thermique à haute vitesse permet de visualiser l’invisible et de mieux comprendre certains processus tel que la rupture d’abalakov! D’autres données obtenue par cette caméra permettrait de pousser l’analyse plus loin.

Références:

1. « Ice Climbing Anchor Strength: An In-Depth Analysis » by J. Marc Beverly, Stephen W. Attaway 2009

2. https://www.petzl.com/US/en/Sport/Rappelling-on-an-abalakov?ActivityName=Ice-climbing

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